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dimanche 22 août 2010

École nationale de musique, visitée le 20 août 2010.


Les bâtiments visités lors de voyages comme celui qui nous occupe actuellement, présentent parfois des attraits insoupçonnés. L’École nationale de musique constitue, pour moi du moins, cet attrait insoupçonné, notamment par la qualité de son implantation sur un terrain qui pourrait sembler plutôt rébarbatif au départ; un terrain à l’étroit, bordé par deux rues, d’une forme triangulaire allongée. Malgré cette difficulté d’implantation, le projet présenté en 1946 par cet architecte mexicain de renom, Mario Pani (1911-1993) en l’occurrence, rempli très bien les fonctions requises pour l’école : accueil, salle de spectacles; espaces académiques et espace (extérieur) de spectacles grand public. À la point du triangle, des fonctions d’accueil : bureaux et cafétéria sont regroupées autour d’un jardin intérieur qui caractérise bien l’architecture mexicaine. La salle de 1000 places, accessible à partir du jardin, est pourvue d’un foyer d’accueil de forme arrondie, tout de béton et très ouvert sur le jardin; encore une caractéristique de l’architecture mexicaine. Arrive ensuite l’amphithéâtre extérieur de 3000 places; cet amphithéâtre, d’ailleurs, n’est pas sans me rappeler (pour le québécois que je suis) celui du Festival d’été de Lanaudière, à Joliette. Pani avait prévu un espace pourvu de bancs de béton, en pente légère permettant
au grand public d’apprécier les concerts extérieurs donnés par les élèves. L’espace fut gazonné par la suite, les bancs sont donc disparus. De chaque côté de cet espace gazonné, se trouvent les fonctions académiques et, enfin, un autre bâtiment, académique, vient refermer l’espace gazonné, créant en quelque sorte un second jardin intérieur. Mario Pani a favorisé l’emploi de la pierre taillée pour les murs du rez-de-chaussée et l’emploi de blocs de maçonnerie pour les murs des étages qui bordent l’amphithéâtre extérieur.


En se promenant dans l’espace gazonné de l’amphithéâtre, le calme des lieux apparaît; lieux constitués de jardins intérieurs bordés de bâtiments ouverts sur les jardins. La recherche du calme dans des villes très animées et très bruyantes n’est-t-il pas très mexicain?





Texte et photographies de Claude Hudon. Photographie aérienne tirée d'Internet.

Journée de vendredi 20 août 2010

Les visites durant cette journée ont porté sur trois projets d’architecture fort différents: l’usine de Bacardi (Mies Van der Rohe, bureaux; Félix Candela, usine, 1957-1961), l’école de musique nationale (Mario Pani, 1946)et le musée expérimental El Eco (Mathias Goeritz, 1953). Marc Doré et Claude Hudon vous feront part de leurs impressions quant aux deux premiers projets. Pour ma part, je me concentre sur le musée qui d’ailleurs était l’œuvre dont je devais faire la présentation in situ et dont vous pourrez lire la description sur un autre de mes billets.

Du côté du processus de patrimonialisation du musée expérimental El Eco, nous avons constaté que l’UNAM avait misé sur une restauration respectueuse de l’état d’origine du musée. Cependant, les expérimentations artistiques que l’administration du musée permises par l’administration du musée ne se font pas sans heurts au cadre bâti historique. Pourquoi avoir tant dépensé pour restaurer une œuvre qui nous semblait être du patrimoine moderne et aujourd’hui permettre au nom de la pleine liberté de création – incluse dans la commande initiale faite par le mécène, Daniel Mont – un travail artistique niant l’espace dans lequel il s’insère. Il semble qu’il y ait une incompréhension du programme et du parti architectural souhaité par les collaborateurs du projet. Pour Goeritz cet espace architectural n’était pas prévu pour être utile, mais était pensé comme une sculpture. Il y voyait bien sur une architecture vivante où les artistes réalisaient des performances et où le public était convié à tout moment durant le processus de création. Mais il ne semble pas qu’il entendait que son œuvre puisse être touchée, voire niée par les artistes en résidence. L’œuvre pose donc un problème quant à son usage réel et cela demanderait une réflexion plus poussée sur comment mettre à profit l’espace tout en respectant sa valeur patrimoniale.

Un constat pourrait être fait en regard de l’agrandissement contemporain que l’UNAM a fait réaliser. Il s’agit d’un projet tout en mimétisme qui bien que le parti architectural soit très réussi ne permet pas au commun des mortels de savoir où le musée commence et où son annexe débute. Nous avons aussi remarqué que le cadre bâti environnant, notamment un édifice plus haut que le musée et peint en bourgogne nuisait à la lecture des espaces du musée. Bien entendu, le musée n’étant pas protégé par aucune loi, il ne bénéficie pas d’une aire de protection qui permettrait d’assurer que rien ne vienne en conflit avec l’objet pour lequel on a mis tant de soin à remettre en état.

Pour connaître d’autres opinions émises par les étudiants et participants du voyage à cet effet, je vous enjoins de lire le billet portant sur le séminaire de synthèse 1 écrit par Josée Laplace.

Texte par Soraya Bassil

vendredi 20 août 2010

Journée du jeudi 19 août 2010


Notre journée de jeudi se partageait entre deux architectes : Félix Candéla et Luis Barragán. En premier lieu, Dr. Juan Ignacio del Cueto nous a offert une conférence fort éclairante portant sur les voiles de béton réalisés par l’architecte d’origine espagnole Félix Candela (1910-1997) qui vécu à Mexico entre 1939 et 1971. À l’aide de diapositives et d’animations, nous avons appris que l’architecte-ingénieur travaillait selon des calculs mathématiques ces structures hyperboliques (doubles courbes concaves et convexes). On peut regrouper ses œuvres conjointes avec d’autres architectes selon quatre groupes d’expérimentations : la courbe simple, la courbe tronquée, le parapluie et les courbes fusionnées. Cela nous a permis de découvrir comment ses formes complexes sont en fait des conçues selon une grille de lignes droites fort simple. Cette séance avait pour but de nous introduire à l’ensemble de l’œuvre avant les visites in situ où nous découvrirons l’usine et les bureaux de la compagnie Bacardi (1957-1961), la chapelle Nuestra Senora de la Soledad (1955), le marché de Coyoacan (1955) et l’église La Medalla Milagrosa (1953-1955). Pour en apprendre davantage, notre conférencier nous propose une exposition rétrospective qui sera inaugurée sous peu à Valencia (Espagne).
La seconde partie de la journée a été consacrée à Barragán. Nous avons visité des œuvres de l’architecte soit : la Maison-Atelier Luis-Barragán (1947-1948), le quartier Las Arboledas (1958-1963) et la maison Egerstrom. Le premier arrêt c’est fait à la maison-Atelier Luis-Barragán (1947-1948) où l’architecte Catalina Corcuera nous a guidé à travers les dédales de la résidence et offert, sur la terrasse, un bref résumé du processus de classement sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Cette œuvre se présente comme une architecture émotionnelle qui permet à l’architecte de créer des zones de fermetures et d’ouverture commandant le recueillement quasi religieux. Tant l’espace que la couleur et les ouvertures contribuent à cet effet des plus réussis. Aujourd’hui transformé en musée, la maison reçoit un maximum de 10 000 visiteurs par année, afin de ne pas créer d’usure prématurée des lieux. La maison est d’ailleurs maintenue comme du vivant de l’architecte. Les peintures à la chaux sont mêmes rafraîchies tout les ans et les jardiniers entretiennent le jardin qui contribue à l’émotion des lieux. Mais quant est-il de la patine historique et cette remise à neuf continuelle pose-t-elle des problèmes à long terme pour la valeur patrimoniale ?

Au second site, le quartier de Las Arboledas, Marie-Ève, une étudiante au DESS, nous a offert un bref topo sur la réalisation du quartier et entre autres le parc linéaire du Paso de los Gigantes comprenant encore l’abreuvoir à chevaux, les murs aveugles théâtralisant l’espace et créant des enclos visuels oblitérant la ville; séparant la circulation des voitures de celle des chevaux inclus dans le parc linéaire. Par la suite, nous nous sommes dirigés vers la maison Egerstrom où Edwige, une autre étudiante, nous a permis de mieux comprendre les divisions des espaces entre la maison, le jardin, l’écurie, etc. Ici encore, la présence de la fontaine est très importante. On en retrouve une autre semblable sur la rue menant à cette maison. L’eau devient sous la main de l’architecte une masse sans fin qui semble fusionner avec le niveau du sol.

Pour en apprendre davantage sur les œuvres visitées aujourd’hui allez lire les textes de Claude, Marie-Ève et Edwige.

Texte et photographie de Soraya Bassil

Deux œuvres de Luis Barragán

(jeudi 19 août 2010)
Mexico est un immense embouteillage sans fin dont on espère finir par sortir à la fin de la journée. Y trouver deux œuvres de l'architecte mexicain Luis Barragán (1902-1988) qui ont de forts liens avec le monde rurale est un peu surprenant. Les visites de cette première journée du voyage sont consacrées à deux œuvres de Barragán. La maison qu'il construisit pour lui-même et qu'il habitat de 1948 à son décès quarante ans plus tard fait partie de la Liste du patrimoine mondial de l'Unesco depuis 2004. C'est une maison qui avant d'être fonctionnelle fut conçue comme un lieu d'émotion. Située dans un quartier populaire et ouvrier, elle est totalement tournée vers la petite forêt que Barragán fit aménager dans la partie arrière du grand lot qu'il avait acquis et qui en occupe environ la moitié. L'intérêt de cette maison tient aux espaces discrets, presque intimes, dotés de vues vers le petit bois, ou simplement d'ouvertures lumineuses, qu'on retrouve partout dans la maison, en dialogue avec l'extérieur protégé. Dans cette mégalopole de 20 millions d'habitants, cette maison réussit à transmettre les émotions que Barragán est allé chercher dans le monde rural des haciendas de son enfance.



La maison Egerstrom, construite à la fin des années 1950, est quant à elle une véritable fermette moderne en milieu suburbain. Encore une fois, Barragán recrée d'une certaine manière son enfance dans une hacienda de la région de Guadalajara, d'où il origine. L'établissement abrite encore plusieurs des chevaux de la famille Egerstrom, les propriétaires; ces chevaux de course y vivent et s'y entraînent quotidiennement. L'intérêt ici est l'utilisation, pour un établissement rural, du vocabulaire architectural moderne utilisé ailleurs par Barragán : un parti-pris géométrique qui s'exprime dans les murs de béton aux riches coloris pour délimiter une cours en partie fermée; une maison cubique en béton blanchi; des vues qui alternativement enferment et ouvrent l'espace; mais aussi, une appropriation du langage des constructions rurales traditionnelles mexicaines, faisant largement usage du bois, surtout du pin.




Texte de Marc Doré
Photographies de Soraya Bassil et Marc Doré

dimanche 13 décembre 2009

Appel à communication, colloque sur la sauvegarde de l'architecture moderne

Invitation à soumettre une communication faite aux architectes, ingénieurs, urbanistes, architectes du paysage, designers, professionnels de la conservation, artistes en arts visuels, archivistes, muséologues, historiens de l’art, de l’architecture et de la culture, sociologues, anthropologues, professeurs, étudiants, propriétaires, gestionnaires et promoteurs immobiliers.

Le colloque est organisé par l'École de design et l'Institut du patrimoine de l'UQAM, ainsi que par le Forum canadien de recherche publique sur le patrimoine.

Pour de plus amples informations sur le colloque veuillez vous rendre à http://www.colloquemoderne.ca/ ou sur le site de l'Institut du patrimoine de l'UQAM à http://www.ip.uqam.ca/.

À la découverte du patrimoine moderne de Mexico et participation à la XIe conférence de Docomomo International du 18 au 28 août 2010


Le prochain voyage d'études hors Québec aura lieu du 18 au 21 août 2010. Il sera axé sur la visite d'édifices et d'ensembles urbains modernes et la rencontre de représentants de groupes et d'organismes ainsi que de professionnels œuvrant à la protection et à la sauvegarde de l'architecture moderne à Mexico.

Les étudiants auront ensuite la chance de participer à la Conférence de Docomomo International du 24 au 27 août 2010.

Pour de plus amples informations, visitez : www.docomomo.com/fr-conference11.htm et écrivez à France Vanlaethem à francine.vanlaethem@uqam.ca.

« Habiter le patrimoine », les Unités d’habitations de Le Corbusier


Durant le voyage de l’été 2009, j’ai été interpellée par la mission sociale des habitations collectives plus particulièrement celle des « unités d’habitations de grandeur conforme » de Le Corbusier. Ce qui m’a amené à poursuivre une réflexion sur l’appropriation et ses différents enjeux. Voici en quelques mots la problématique sur laquelle j’ai travaillé à notre retour.

La première unité est La Cité radieuse construite à Marseille entre 1948 et 1952. On la considère comme le prototype du logement collectif corbuséen. Il s’agit de l’expérience la plus achevée sur le plan de l’intégration en un même volume des fonctions, des équipements et des logements. Toutefois, la recherche de Le Corbusier s’est poursuivie à travers quatre autres projets pour aboutir avec Le Corbu de Firminy achevé par Wogenscky entre 1965 et 1967. En quelque sorte, chaque unité est distincte puisqu’elle est issue de particularités architecturale, locale et politique bien différentes.

Mais ce qui les unis c’est le fait qu’elles ont toutes été créées selon des intensions de vie collective où un certain nombre de valeurs réciproques participe à la construction d’une « identité commune ». L’architecture contribue en quelque sorte par la présence de divers éléments tels les rues, les clubs, le toit-terrasse et l’école viennent créer une adhésion forte de la part des locataires. Ainsi, chaque occupant a le sentiment d’appartenir à autre chose, la vie en collectivité devient une de ses valeurs et il trouve normal de se rassembler au sein d’une association.

Les habitants des unités corbuséennes sont à l’origine de la mobilisation politique qui a joué un rôle primordial dans la sauvegarde de cette architecture de béton. Mais avec la reconnaissance à titre de patrimoine, une nouvelle appropriation symbolique est en train de s’effectuer au détriment de la mission sociale. Ce changement qui tire sa source des nouvelles valeurs identitaires de la société vient d’une certaine manière pervertir leur usage en transformant le mode de propriété de logement collectif à de la copropriété. Il y a lieu de se demander si on peut impunément changer ce mode de propriété sans faire perdre à ces édifices aujourd’hui « classés à titre de monument français » une certaine partie de leur authenticité immatérielle.

Si je reprends l’exemple de la Cité Radieuse de Marseille, elle me semble être un cas à part. En effet, la valeur de cet immeuble comme monument réside bien plus dans le fait qu’il est le prototype des unités d’habitation que pour son sa mission sociale. En 1954, soit deux ans seulement après son inauguration, la cohabitation entre de deux types d’habitations : la propriété privée et le logement locatif, s’est déjà installé. Dès les premiers temps cette unité perd en grande partie sa mission sociale.

À la différence de Marseille, les autres unités ont conservé tant bien que mal leur mission sociale durant plusieurs décennies transférant auprès de leur population l’idée de vie collective souhaitée par Le Corbusier. Ainsi, leur réhabilitation récente en proposant une cohabitation forcée entre propriétaires et locataires manifeste plus distinctement la dichotomie qui existe entre l’appropriation matérielle « d’un monument créé par un grand architecte » et l’appropriation symbolique « de la mission sociale du lieu ».

Le cas du Corbu de Firminy permet de mieux comprendre ce phénomène récent. Avant la patrimonialisation de l’unité en 1993, plusieurs conflits ont opposé les locataires à l’Office Public HLM et à la ville. Je pense bien entendu à la suppression des casiers de service, de la crèche, de l’appartement 50 et des clubs, ainsi qu’aux fermetures successives de l’aile nord, de l'école maternelle et du toit-terrasse. C’est en réaction avec la menace symbolique de leur lieu de vie collective que s’est cultivée la transmission d’une histoire informelle de Le Corbusier. Le noyau de ce lien social était l’association des locataires dont l’histoire avait débuté dès l’ouverture de l’immeuble.

Suite au classement, le programme de restauration et de réhabilitation a divisé en deux l’unité d’habitation : l’aile sud dédiée au logement social et l’aile nord à la copropriété. D’ici quelques années, la mission sociale souhaitée par Le Corbusier est même menacée de ne plus exister. Dès 1980, l’OPHLM au pris avec un déficit important avait déjà tenté de vendre certaines rues de l’unité aux particuliers sans grand succès puisque l’association des locataires s’y était opposé. Elle prétextait alors que la copropriété allait à l’encontre de l’esprit d’une unité corbuséenne et qu’il y aurait ségrégation entre copropriétaires et locataires.

Vingt ans plus tard, ce phénomène a bel et bien lieu puisque la partie sud de l’unité reste toujours attachée aux référents sociaux du projet de Le Corbusier, tandis que la partie nord symbolise l’individualisme et l’ambition sociale. Si aujourd’hui deux conceptions opposées du lieu s’affrontent : l’habitat social et l’œuvre patrimoniale de prestige, on est à même de se demander ce qu’il restera du projet social souhaité par son créateur. Il y a tout lieu de croire que le recul de la mixité sociale va se produire en faveur du phénomène d’embourgeoisement. Déjà les perspectives de pouvoir acheter son logement, même dans la partie sud, a fait en sorte de fidéliser les locataires déjà présents et de remplir à pleine capacité l’unité. Firminy est aujourd’hui un lieu très convoité. En quelque sorte, la valorisation du prestige personnel a surclassé le projet social commun.

Au Québec, des exemples me viennent en tête comme Habitat 67 et Benny Farm. On a lieu de se demander ce qui pourrait advenir des habitations Jeanne-Mance et ce qui resterait comme logement de qualité pour les moins nantis de nos sociétés si tous deviennent la convoitise des mieux nantis ?

Soraya Bassil